Film du Mois - Avril 2011
Charlot Soldat de Charlie Chaplin
Rôles principaux : Charlie Chaplin (le soldat américain – matricule 13), Edna Purviance (une jeune française), Sydney Chaplin (le Kaiser), Jack Wilson (le Kronprinz).
Sorti aux Etats-Unis en octobre 1918 (avril 1919 en France) « Charlot Soldat » (Shoulder Arms) connut un succès immédiat et unanime, particulièrement auprès des combattants de la Grande Guerre.
Ce film burlesque se compose de vingt séquences muettes. Il développe une intrigue simple, centrée sur les aventures hilarantes et décalées d’un soldat américain faisant son apprentissage de la guerre.
Charlot n’est pas l’archétype du guerrier : d’une irrésistible maladresse, il tourne en ridicule le maniement des armes et la marche au pas. Peu disposé à s’adonner aux harassants exercices militaires, il ne songe qu’à dormir sous sa tente.
Arrivé au front, Charlot découvre l’inconfort des tranchées : cette existence rustique est tournée en dérision dans un chapelet de gags dont certains sont entrés dans l’histoire du cinéma. Ainsi la scène du fromage : ayant reçu un colis périmé, Charlot se munit d’un masque à gaz pour extrait un camembert d’un paquet. Il se débarrasse du fromage malodorant qui atterrit dans la tranchée ennemie, sur la tête d’un officier allemand.
Lors d’un assaut, Charlot – mortifié par le numéro 13 de son insigne – est héroïque malgré lui, faisant prisonnier à lui seul toute une section allemande. Peu de temps après, il se porte volontaire pour espionner les lignes adverses, déguisé en arbre. Ayant libéré l’un des siens, il est poursuivi par les Allemands et trouve refuge chez une jeune femme, incarnation idéalisée de la France.
Cette dernière est finalement arrêtée par les Allemands : interrogée et malmenée par un officier brutal, elle est sauvée in extremis par Charlot qui surgit d’une cheminée. Le film prend un tour surréaliste lorsque le Kaiser et son état-major, en visite d’inspection, sont capturés par un Charlot indomptable. Porté en triomphe par ses camarades, Charlot se réveille en sursaut sous sa tente : on comprend dès lors que son épopée n’était qu’un rêve.
Charlie Chaplin accomplit un incomparable tour de force en traitant de la Grande Guerre à travers une histoire burlesque et poétique à mille lieues du comique troupier (bien qu’il décrive sans nuance le camp allemand). Il incarne un soldat américain dont la naïveté et la grandeur d’âme du « héros malgré lui » ont une valeur d’universalité qui a séduit les véritables combattants du front. Attaqué pour son non-engagement dans l’armée britannique, Chaplin a répondu en artiste à l’absurdité de la guerre.
« Charlot Soldat » annonce à bien des égards le chef-d’œuvre absolu du « Dictateur ».
Rubrique écrite par Antoine RODRIGUEZ,
Directeur-adjoint de la Mission Histoire
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Crédit Photo : © Charlot Soldat