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Image Nicole Girard-Mangin (1878-1919)

16/01/2012Nicole Girard-Mangin (1878-1919), une femme médecin dans le service de santé des armées

Nicole Girard-Mangin (1878-1919), une femme médecin dans le service de santé des armées

Par Xavier RIAUD

Elle naît à Paris en 1878. Elle fait sa scolarité et obtient une licence en sciences naturelles dans la capitale. Elle entame des études de médecine et se fait admettre à l’externat des hôpitaux de Paris en 1899. Elle se marie et accouche d’un garçon. Pendant deux ans, elle assiste son mari dans son négoce de champagne à Reims, mais, celui-ci étant volage, son mariage bat de l’aile. Nicole divorce et reprend ses études en 1903. En 1906, elle soutient sa thèse. Professeur libre à la Sorbonne, elle fait paraître un travail sur la prophylaxie antituberculeuse. Présente dans de nombreux congrès internationaux, elle fait référence dans son domaine.

Au début de la guerre, elle est rattachée à l’hôpital Baujon au service de santé civil. Le service de santé des armées cherche un médecin civil pour un hôpital thermal. L’administration militaire l’y envoie sans vérifier son prénom. Missionnée au 20ème régiment, elle rejoint l’hôpital thermal de Bourbonne-les-Bains, avec le grade de médecin-auxiliaire. Un temps désaffecté, elle y prépare de nombreuses attelles et restaure le four du boulanger qu’elle aménage en vue de stérilisations futures, convaincue d’arrivages imminents de blessés en provenance du front. Peu de temps après, un premier convoi d’hommes intransportables lui permet de dévoiler l’étendue de ses compétences. Avec une rigueur et une fermeté qui n’égalent que sa compassion, elle est citée en exemple. Elle permute avec un confrère de Reims, elle est gratifiée d’allocations similaires à celles d’une infirmière.

Au début de l’hiver 1914-1915, elle arrive à Verdun. Dès son arrivée, elle est envoyée à Vadelaincourt où elle exerce à l’HOE n° 12, puis le n° 6. Elle se rend ensuite à Vacherauville, à l’hôpital n° 7 à Regret. Elle s’occupe alors des typhiques et est véritablement traitée comme une pestiférée. Les blessés, les mourants et les maladies affluent. Pourtant, Nicole se voit interdire l’accès aux salles d’hôpital parce qu’elle est une femme. Partout, au gré de ses affectations, elle affirme son autorité et se rend indispensable, ses compétences étant indiscutables. Les blessés l’adulent, car ils sont soignés par une femme. Elle est mutée à l’hôpital n° 13 où elle assiste aux combats de Verdun, désemparée. Le 21 février, les troupes françaises sont débordées par une offensive de grande envergure sur le Chauffour. Le 25, l’évacuation est ordonnée. Il reste 9 hommes qui ne sont pas en état de partir. Nicole décide de demeurer avec eux. Pendant deux nuits, elle connaît l’angoisse avant de ramener quatre des plus atteints à Clermont-en-Argonne, avec son chauffeur. Au cours du détour par Sivry-la-Perche, elle est légèrement touchée par un fragment de mica. Elle parvient à déposer ses patients à Froidos et repart à Bar-le-Duc où sont encore les cinq autres, en pleine zone de combat. Pour ce fait d’arme, elle est promue médecin-major en 1916. Cette même année, elle se voit confier la direction de l’hôpital-école Edith-Cavell. Là, sont assurées les formations des infirmières civiles et temporaires. Nicole occupe cette fonction jusqu’à la fin du conflit. Ses démêlés avec l’administration sont nombreux et elle s’épuise pour obtenir le meilleur pour ses malades. Partout, où elle se rend, elle est accompagnée de son chien Dun qui elle voue une grande affection. Après la guerre, face à l’épidémie de grippe espagnole, elle se dévoue sans compter pour ses malades. Alors qu’elle doit donner une série de conférences à l’étranger, notamment au Japon, en Chine et en Nouvelle-Zélande, elle meurt le 6 juin 1919, après avoir absorbé une trop forte dose de médicaments dans des circonstances troubles.

Si la docteur Nicole Girard-Mangin a été très certainement la seule femme médecin présente dans les zones de combats, elle n’a assurément pas été la seule femme médecin du service de santé des armées françaises.

Nicole Mangin 

Nicole Girard-Mangin (domaine public)

Références bibliographiques :

Guirimand Nicolas, « De la réparation des « Gueules cassées » à la « sculpture du visage ». La naissance de la chirurgie esthétique en France pendant l’entre-deux-guerres. », in Actes de la recherche en sciences sociales, 2005, n° 156-157, pp. 72-87.
Jacquemin Jeannine, « Suzanne Noël (1878-1954), Pionnière de la chirurgie esthétique et du mouvement féminin Soroptimist », in Revue d’Histoire des Sciences Médicales, 1988, vol. 22, n° 1, pp. 21-28. Schneider Jean-Jacques, Nicole Mangin, une Lorraine au cœur de la Grande Guerre, Place Stanislas (éd.), 2011.
Union française du Soroptimist international, communication personnelle, Paris, 2009. www.lunion.presse.fr, « Nicole Girard-Mangin, médecin militaire à Verdun et en Argonne en 14-18. Un dévouement à toute épreuve », in L’Union, 2010, pp. 1-3.

Xavier RIAUD : Docteur en chirurgie dentaire, Docteur en épistémologie, histoire des sciences et des techniques, Lauréat et membre associé national de l’Académie nationale de chirurgie dentaire.

 

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